Instantané

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Mo.Mi

mardi 8 mars 2016

Errance vagabonde #1

Portrait (imaginaire) de Mo.Mi, par Ludovic Huart, auteur et metteur en scène, directeur du Théâtre de la Grande Ourse

Mo.Mi naquit le 28 février 1987. A peine les yeux ouverts, il eut la tête dans les étoiles. Certains racontent même qu'il fut déposé par une fusée sous un pied de vigne fraichement planté par un vieux monsieur qui devint son grand-père. Petit fils de vigneron, il grandit donc dans le monde de la terre, celui des paysans, des vrais gens, qui se lèvent tôt et travaille dur. Enfant, il regarde son père photographier ces ombres errantes, ces gueules cassées, ces visages qui livrent parfois à travers les images des histoires douloureuses. Il grandit dans une famille nombreuse entouré de ses frères et soeur tout en rêvassant d'un monde autre, un monde qu'il imagine au gré de ses aventures extraordinaires à travers bois, dans son quartier où il retrouve souvent ses amis avec qui il livre bataille tel un Peter Pan aux cheveux ébouriffés et aux yeux d'un regard profond, qui regardent le monde avec une douce mélancolie. Bricoleur et inventeur de machines à remonter le temps, Mo.Mi est aujourd'hui devenu un jeune enfant sauvage qui troque volontiers les pavés parisiens contre les pierres calcaires des montagnes de son enfance. Adolescent, il emprunte volontiers l'appareil photo de son père pour garder en mémoire toutes les images de son temps, un temps qui semble suspendu à ses doigts. Hiver comme été, au grès de ses nombreuses errances à travers des territoires hostiles, Mo.Mi se laisse surprendre par la beauté naturelle du monde, et tisse avec la nature un rapport poétique et intime pour témoigner de son aventure intérieure. Il capture des lieux et des espaces de solitude dont le temps semble suspendu, ici, le temps n'est plus, le présent semble éternel. Marcheur, de jour comme de nuit, à la recherche du temps perdu, il se laisse surprendre par des rencontres insolites, parfois improbables. De ces errances passées à user ses semelles au grès des vents et des chemins de pierre, il immortalise le vivant, arpentant les villes et les forêts.
À travers son travail, il vise aujourd'hui à créer des œuvres qui transcendent la réalité que nous voyons tous, à une réalité plus profonde, que nous pouvons tous ressentir. La vision de Mo.Mi pour sa photographie se trouve sur le bord de ses rêves, de l'autre côté du miroir, où la nature semble irréelle, l'enfance, intemporelle. Soigneusement construites, ses expositions laissent entrevoir une lumière même quand le soleil n'est plus ou quand le ciel semble vidé d'étoiles. Mo.Mi aime la solitude de la forêt et des champs de coton. Il aime les îles fantômes et volcaniques qui lui rappellent ses origines, celle de la Réunion, ses odeurs d'épices et de rhum arrangé. Mais de cette solitude, il aime aussi se retrouver en famille, entre amis, et partager avec eux des instants qu'il fige sur le papier, pour ne rien oublier, pour rappeler que le temps n'efface rien, pas même les quelques rides qui se forment sur le visage de son plus vieux compagnon de route, le seul qu'il n'ait presque pas lâché depuis son plus jeune âge, son appareil photo. Aujourd'hui, au gré des vents et du soleil levant, des lumières célestes au paradis blanc, Mo.Mi traverse les âges et les chemins de traverses, les villes abandonnées, les forêts légendaires, les paysages désolés et les montagnes vertigineuses, pour livrer aux voyageurs immobiles ses petites histoires, où le passé et l'avenir se côtoient amoureusement. Mo.Mi parcourt les routes, ici et là, alors, rien ne sert de le chercher, il n'est déjà plus là. Il semble déjà loin. Je crois qu'il rêve encore à moins, que ce soit nous, voyageurs immobiles, qui soyons loin, dans le lointain insaisissable des photographies qu'il nous donne à contempler comme une fenêtre ouverte sur le monde, un monde autre, le sien.